En 1515, la Vierge Marie serait apparue trois fois à la jeune bergère Anglèze de Sagazan. Elle rapporte les messages : « Ici, je répandrai mes dons », « Je veux que l’on construise une chapelle », « N’oubliez pas de remercier Dieu de ses bienfaits ». Après les apparitions de la Vierge, une petite chapelle est construite près de la source. De nombreux pèlerins viennent s’y recueillir, se faisant de plus en plus important, aussi la petite chapelle est remplacée par l’actuelle construite en 1540.

En 1905, l’écrivain et politicien anticlérical Jean de Bonnefon souligna certaines ressemblances entre les origines des sanctuaires de Garaison et de Lourdes : à Garaison, dans une année d’une grande stérilité, la Vierge, habillée de blanc, apparaît à une bergère pauvre, âgée de dix ou douze ans, près d’une source ombragée par une aubépine, et elle demande une chapelle ; les autorités ne croient la messagère qu’après deux autres apparitions et un miracle ; la population se rend alors en procession sur les lieux de l’apparition ; on construit la chapelle demandée et on y conduit l’eau de la source ; les miracles et les guérisons soudaines se multiplient et la voyante entre dans un monastère, les consuls de Monléon lui ayant assuré une pension viagère provenant des offrandes déposées à la chapelle. Bonnefon voyait dans ces ressemblances la preuve que « l’abbé Peyramale et ses complices (…) ont profité des expériences faites trois siècles plus tôt dans les Pyrénées, au village de Garaison »3.

De 1600 à la Révolution française, sous l’impulsion de l’évêque d’Oloron et des religieux résidents, Notre-Dame-de-Garaison est un important lieu de pèlerinage.

En 1903, en application de la loi du 1er juillet 1901 qui interdit aux congrégations d’enseigner, le collège est fermé. Les religieux Missionnaires de l’Immaculée Conception doivent partir. Pendant la Première Guerre mondiale, Garaison sert de camp d’internement. En 1923, les anciens élèves rachètent les bâtiments : les religieux peuvent revenir et le collège renaître.

En 2000, un incendie ravage l’établissement scolaire. Les membres de la congrégation, fidèles à leur mission, décident de restaurer entièrement les locaux.

En septembre 2015, la Congrégation de Sainte-Croix prend le relais et assure désormais le bon fonctionnement du sanctuaire de Notre-Dame-de-Garaison.

Philippines, 12 septembre au 12 Novembre 1948 / Teresita Castillo

Notre-Dame de Lipa est le nom sous lequel est invoquée la Vierge Marie telle qu’elle serait apparue à une jeune postulante carmélite : Teresita Castillo, à Lipa, municipalité de la province de Batangas, aux Philippines. Elle lui serait apparue à une dizaine de reprises du 12 septembre au 12 novembre 1948.

Dès les premières années, ces évènements font l’objet de débats : rejeté officiellement par l’Église catholique en 1951 après l’étude par une commission d’experts, le dossier est rouvert par l’évêque de Lipa dans les années 1990 qui autorise à nouveau la dévotion à Notre-Dame de Lipa. En 2005, une nouvelle commission reprend l’étude des « apparitions de la Vierge » à la demande de l’évêque du lieu. Cette enquête se conclut le 12 septembre 2015 par la publication d’un décret signé de Mgr Ramón Cabrera Argüelles (évêque de Lipa) qui déclare comme « authentiques les manifestations » survenues dans le Carmel de Lipa. 

Mais le 1er décembre 2015,  la Congrégation pour la doctrine de la foi rédige un décret (publié le 31 mai 2016) déclarant que « les apparitions de la Vierge à Lipa ne sont pas authentiques ». En conséquence de quoi, la congrégation vaticane annule toutes les décisions antérieures de Mgr Argüelles.

France / Février à Juillet 1858 Notre Dame de lourdes

I – Généralités

Pays de l’apparition

France

Site 

Lourdes est une commune française située dans le département des Hautes-Pyrénées, en région Occitanie.

Le site de Lourdes vers 1860
Par Charles Mercereau (1822-1864) — http://numerique.bibliotheque.toulouse.fr/ark:/74899/B315556101_A_MERCEREAU_7_028, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18949516

Désignation  

Notre Dame de Lourdes 

Contexte historique

L’Europe poursuit la colonisation du monde. L’Allemagne, avec la Prusse à l’œuvre, marche vers son unité. 

26 – 27 juin : le traité de Tianjin renforce considérablement la puissance commerciale des Français et des Britanniques en Chine.

1er2 septembre : la France débarque à Tourane (Da Nang – Viêt Nam).

15 décembre : Ferdinand de Lesseps crée la Compagnie universelle du canal maritime de Suez ; la France détient la moitié du capital, le khédive d’Égypte 44 %

18 février : première constitution ségrégationniste du Transvaal.

20 mai : en Mauritanie, le général français Faidherbe, gouverneur du Sénégal impose la souveraineté française aux tribus Trarza qui contrôlaient les escales du bas Sénégal et rançonnaient les commerçants.

31 maicampagne de Cochinchine : une escadre française commandée par l’amiral Rigault de Genouilly mouille devant Tourane, pour protéger les missions catholiques tout en s’assurant des débouchés en Indochine.

6 septembre : prise de Jambi. Les Hollandais annexent les principautés côtières du nord-est de Sumatra.

27 janvier, Delhi : début du procès de l’empereur moghol Bahadur Shah II. Condamné pour trahison le 9 mars, il est déposé et exilé à Rangoon. Sa famille est décimée par le lieutenant William Hodson (en). Les Britanniques profitent de la révolte pour éliminer l’aristocratie indienne. La population indienne est massacrée et torturée sans distinction.

17mars : Irish Republican Brotherhood. La fraternité républicaine irlandaise, les Fenians, demandant la création d’une république indépendante et démocratique, est fondée à Dublin pour renverser le pouvoir britannique.

29 avril : le Portugal abolit l’esclavage dans un délai de 20 ans.

7 octobre : le prince Guillaume devient régent de Prusse. Il renverse Frédéric-Guillaume IV de Prusse, son frère, et inaugure une nouvelle ère : la Prusse mène désormais le combat pour l’unité allemande

II – La voyante 

Bernadette Soubirous, de son vrai nom Marie-Bernarde Soubirous, née le 7 janvier 1844 à Lourdes, et morte le 16 avril 1879 à Nevers, est une sainte catholique française. Elle ne naît pas dans une famille pauvre mais qui va descendre dans la misère ; c’est une famille où l’on prie ; pas d’école pour Bernadette : il faut servir au cabaret de tante Bernarde. Pas de catéchisme : sa mémoire rebelle ne retient pas les formules abstraites. À 14 ans, elle ne sait ni lire, ni écrire, en souffre et  se sent exclue. Pourtant si Bernadette est inculte, elle a une forte personnalité et les pieds sur terre. Elle ne parle pas le français mais le patois local.

Lors de sa première apparition, elle a 14 ans et se demande ce qui lui arrive ; sur le coup, elle fait preuve d’un bon sens et d’un discernement remarquables ; elle se frotte les yeux, essaie de comprendre, se tourne vers ses compagnes pour vérifier ses impressions, prend conseil en confession auprès de l’abbé Pomian : « J’ai vu quelque chose de blanc ayant la forme d’une dame.» Interrogée par le commissaire Jacomet, elle répond avec une assurance, une prudence et une fermeté qui surprennent chez une jeune fille sans instruction : « Aquero, je n’ai pas dit la Sainte Vierge… Monsieur, vous m’avez tout changé». Elle dit ce qu’elle a vu avec un détachement, une liberté  étonnants : « Je suis chargée de vous le dire, pas de vous le faire croire. »

Elle raconte les Apparitions avec exactitude, sans rien ajouter ni retrancher. Elle désigne la Vierge par le terme aquero  : « cette chose là »  et part en courant en répétant sans cesse, sur le chemin, ces mots que lui a dits la Vierge et qu’elle ne comprend pas : « Que soy era immaculada councepciou« . (Je suis l’immaculée conception).  La voyante n’est pas crue ; on la menace de prison. En l’espace de quelques mois, Bernadette Soubirous, alors âgée de 14 ans, était devenue une célébrité internationale, tandis que la vie dans cette bourgade des Pyrénées commençait à être transformée par l’affluence de pèlerins, de curieux et de journalistes.

Bernadette Soubirous , enfant
Par Inconnu — Weltwoche 8/08, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3703523

Entre 1858 et 1866, Bernadette continue de vivre à Lourdes, où sa situation devient, cependant, de moins en moins tenable. Sans cesse sollicitée, tout en refusant de percevoir quoi que ce soit en rapport aux apparitions ou à sa célébrité, elle se pose la question d’une vie religieuse. En 1864, suivant la recommandation de l’évêque de Nevers, elle se décide à entrer chez les sœurs de la Charité. Deux ans plus tard, alors que la construction de la basilique est en cours, Bernadette a 22 ans et quitte Lourdes pour entrer au couvent Saint-Gildard, à Nevers. Elle y mène treize années d’une vie de « religieuse ordinaire », ayant néanmoins la particularité de recevoir la visite de nombre d’évêques, parmi ceux qui souhaitent se faire une opinion sur elle et sur les apparitions.

Souvent malade et de santé fragile, elle s’occupe de l’infirmerie, quand elle n’y est pas elle-même soignée. Aucun emploi n’est prévu pour elle : alors l’évêque lui donne l’emploi de prier. « Priez pour les pécheurs», avait dit la Dame. Elle y sera fidèle. « Mes armes, écrit-elle au pape, sont la prière et le sacrifice. » La maladie fait d’elle un pilier d’infirmerie. Elle fait ses vœux perpétuels en 1878, puis meurt le 16 avril 1879, à l’âge de 35 ans. Bernadette Soubirous est béatifiée le 14 juin 192puis canonisée le 8 décembre 1933 par le pape Pie XI

Sa fête est célébrée le 16 avril (en France, le 18 février). Lorsqu’on ouvre son cercueil quelques années plus tard, le corps de Bernadette est dans un exceptionnel état de conservation. En 1868, paraissait le livre de Henri Lasserre, intitulé Notre-Dame de Lourdes, qui connaît un grand succès et est traduit en 80 langues. En 1869, le pape Pie IX écrira une lettre à l’auteur pour l’en féliciter, reconnaissant ainsi implicitement ces apparitions.

À la fin du XIXe siècle, la foule qui afflue à Lourdes intéresse nombre d’intellectuels. Parmi eux, Émile Zola (Lourdes), Joris-Karl Huysmans (Les Foules de Lourdes), François Mauriac (Les Pèlerins de Lourdes) ou encore Paul Claudel. L’ensemble des archives et des témoignages sur Bernadette Soubirous a fait l’objet d’un travail de recensement et d’édition critique par René Laurentin, dans les années 196070

François Mauriac
French poet, playwright and diplomat Paul Claudel (1868-1955)
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« Le secret de Lourdes c’est Bernadette ! » par le Père Laurentin, historien des apparitions de Lourdes. 

L’abbé René Laurentin, né le 19 octobre 1917 à Tours et mort le 10 septembre 2017 (à 99 ans) dans le 7e arrondissement de Paris, est un prêtrethéologien et exégète français, spécialiste notamment des apparitions mariales. Il fut longtemps chroniqueur religieux au Figaro. Il a écrit de nombreux livres sur les apparitions mariales dans le monde. Il a publié une centaine d’ouvrages. Ancien expert au Concile Vatican II, Membre de l’Académie théologique pontificale « Pontificia Academia Mariana Internationalis » de Rome, professeur à l’université catholique de l’Ouest, il a été « visiting professor » dans plusieurs universités d’Amérique et d’Italie.

Toutce que nous savons des Apparitions et du Message de Lourdes nous vient de Bernadette. Elle seule a vu. Qui est-elle donc ? On peut distinguer trois périodes dans sa vie : les années de son enfance au sein d’une famille pauvre ; une vie « publique » au temps des Apparitions et du témoignage ; enfin, une vie « cachée » comme religieuse, à Nevers.

Avant les apparitions 

Quand on raconte les apparitions, Bernadette est souvent présentée comme une fille pauvre, malade et ignorante, logée misérablement au Cachot. Sans doute, mais il n’en a pas toujours été ainsi. Lorsqu’elle naît le 7 janvier 1844, au Moulin de Boly, elle est le premier enfant, l’héritière, de François Soubirous et Louise Castérot qui se sont mariés par amour. Bernadette grandit dans une famille unie où l’on s’aime et où l’on prie. Dix ans de bonheur en ces années décisives de son enfance qui vont forger sa forte personnalité et lui donner un bel équilibre. La descente dans la misère qui suivra n’effacera pas cette richesse humaine. Il reste que Bernadette, à 14 ans, mesure 1m 40. Elle a des crises d’asthme. Elle a une nature vive, spontanée, volontaire, prompte aux réparties, incapable de dissimuler.

Elle a de l’amour-propre, ce qui n’a pas échappé à la mère Vauzou, à Nevers, qui disait d’elle : «Caractère raide, très susceptible.» Bernadette se désolait de ses défauts et les combattait énergiquement. Une forte personnalité mais inculte. Pas d’école pour Bernadette : il faut servir au cabaret de tante Bernarde. Pas de catéchisme : sa mémoire rebelle ne retient pas les formules abstraites. À 14 ans, elle ne sait ni lire, ni écrire et en souffre, elle se sent exclue. Alors elle réagit. Septembre 1857 : on l’envoie à Bartrès. Le 21 janvier 1858, Bernadette rentre à Lourdes : elle veut faire sa première communion. Elle la fera le 3 juin 1858, durant les apparitions.

La vie publique 

Les apparitions débutent le 11 février 1858. Pour aider ses parents, Bernadette se chargeait notamment d’aller chercher du bois mort sur les berges du Gave. La voici confrontée au mystère. Un bruit « comme un coup de vent », une lumière, une présence. Sa réaction ? Elle fait preuve d’un bon sens et d’un discernement remarquables ; croyant se tromper, elle mobilise toutes ses ressources humaines : elle regarde, elle se frotte les yeux, elle essaie de comprendre. Ensuite, elle se tourne vers ses compagnes pour vérifier ses impressions : « Avez-vous rien vu ? ».

Elle se tourne ensuite vers Dieu : elle prie son chapelet. Elle se tourne vers l’Église et prend conseil en confession auprès de l’abbé Pomian : « J’ai vu quelque chose de blanc ayant la forme d’une dame. » Interrogée par le commissaire Jacomet, elle répond avec une assurance, une prudence et une fermeté qui surprennent chez une jeune fille sans instruction : « Aquero, je n’ai pas dit la Sainte Vierge… Monsieur, vous m’avez tout changé». Elle dit ce qu’elle a vu avec un détachement, une liberté  étonnants : « Je suis chargée de vous le dire, pas de vous le faire croire.

Elle raconte les Apparitions avec exactitude, sans rien ajouter ni retrancher. Une seule fois, effrayée par la rudesse de l’abbé Peyramale, elle ajoute un mot : « Monsieur le curé, la Dame demande toujours la chapelle… même toute petite.» Dans son Mandement sur les Apparitions, Mgr Laurence souligne «la simplicité, la candeur, la modestie de cette enfant… elle raconte tout sans affectation, avec une ingénuité touchante… et, aux nombreuses questions qu’on lui adresse, elle fait, sans hésiter, des réponses nettes, précises, empreintes d’une forte conviction ». Insensible aux menaces comme aux offres avantageuses, «la sincérité de Bernadette est incontestable : elle n’a pas voulu tromper ».

Mais ne s’est-elle pas trompée elle-même… victime d’une hallucination ? – se demande l’évêque. Il évoque alors le calme de Bernadette, son bon sens, l’absence chez elle de toute exaltation et aussi le fait que les Apparitions ne dépendent pas de Bernadette : elles ont lieu alors que Bernadette ne s’y attendait pas, et dans la quinzaine, par deux fois, alors que Bernadette se rendait à la Grotte, la Dame n’y était pas. Pour en arriver à ces conclusions, Bernadette a dû répondre aux curieux, admirateurs, journalistes et autres, comparaître devant des commissions d’enquête civiles et religieuses. La voilà tirée de l’ombre et projetée au premier plan de l’actualité : « une tempête médiatique » s’abat sur elle. Il lui aura fallu de la patience et de l’humour pour lui résister et préserver la pureté de son témoignage.

Elle n’accepte rien : « Je veux rester pauvre. » Elle ne bénit pas les chapelets qu’on lui présente : « Je ne porte pas l’étole. » Elle ne vendra pas de médailles : « Je ne suis pas marchande. » Et, devant les images à dix sous qui la représentent, elle lance : « Dix sous, c’est tout ce que je vaux ! ». Dans ces conditions, au Cachot la vie n’est plus possible, il faut protéger Bernadette.

Le curé Peyramale, et le maire Lacadé se mettent d’accord : Bernadette sera admise comme « malade indigente » à l’hospice tenu par les Sœurs de Nevers ; elle y arrive le 15 juillet 1860. À 16 ans, elle apprend à lire et à écrire. On peut voir encore aujourd’hui, à l’église de Bartrès, les « bâtons » tracés de sa main ! Par la suite, elle écrira souvent à sa famille et même au pape ! Elle rend visite à ses parents qui ont été relogés à la « maison paternelle ». Elle soigne quelques malades, mais surtout elle cherche sa voie : bonne à rien et sans dot, comment être religieuse ? Finalement, elle entre chez les Sœurs de Nevers « parce qu’on ne m’y a pas attirée ». Dès lors, une vérité s’impose à son esprit : « À Lourdes, ma mission est finie. » Maintenant, elle doit s’effacer pour laisser toute la place à Marie.

La vie cachée à Nevers

C’est elle-même qui emploie cette expression : « Je suis venue ici pour me cacher. » À Lourdes, elle était Bernadette, la voyante. A Nevers, elle devient Sœur Marie-Bernard, la sainte. On a souvent parlé de la sévérité des supérieures à son égard, mais il faut bien comprendre que Bernadette était un cas : il fallait la soustraire à la curiosité, la protéger, et protéger aussi la congrégation. Bernadette fera le récit des Apparitions devant la communauté des sœurs réunies, dès le lendemain de son arrivée ; ensuite, elle ne devra plus en parler. On la gardera à la Maison-mère, alors qu’elle aurait tant aimé soigner les malades. Au jour de sa profession, aucun emploi n’est prévu pour elle : alors l’évêque lui donne « l’emploi de prier ». « Priez pour les pécheurs », avait dit la Dame. Elle y sera fidèle. « Mes armes, écrit-elle au pape, sont la prière et le sacrifice. »

Le couvent saint Gildard, maison mère, à Nevers
Par Cypris — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=18317182

La maladie fait d’elle un pilier d’infirmerie, et puis il y a ses interminables séances au parloir : « Ces pauvres évêques, ils feraient mieux de rester chez eux. » Lourdes est bien loin… revenir à la Grotte, jamais ! Mais, tous les jours, elle y fait son pèlerinage en esprit. Elle ne parlera pas de Lourdes, elle en vivra. « Vous devez être la première à vivre le message », lui dit le Père Douce, son confesseur. Et, de fait, après avoir été aide-infirmière, elle entre peu à peu dans l’état de malade. Elle en fera « son emploi », acceptant dans un acte d’amour parfait toutes les croix, pour les pécheurs : « Après tout, ce sont nos frères. »

Au cours des longues nuits sans sommeil, s’unissant aux messes qui sont célébrées dans le monde entier, elle s’offre comme une « crucifiée vivante » dans le gigantesque combat des ténèbres et de la lumière, associée, avec Marie, au mystère de la Rédemption, les yeux fixés sur le crucifix : « C’est là que je puise ma force. » L’Église l’a proclamée sainte le 8 décembre 1933, non pour avoir été favorisée des Apparitions, mais pour la manière dont elle y a répondu.

La châsse de Bernadette Soubirous à Nevers
Par Bernadette_Soubirous-sarcophagus.jpg: Original uploader was Roock at pl.wikipediaderivative work: Rabanus Flavus (talk) — Bernadette_Soubirous-sarcophagus.jpg, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=15509213

III – L’Apparition (généralités) 

Date

Entre le 11 février et le 16 juillet 1858. Soit les 11,14, 18, 19, 20, 21, 23, 24, 25, 27 et 28 Février ; les 1,2,3,4 et 25 Mars ; les 7 Avril et 16 Juillet, Aucun des jours de la semaine n’est privilégié.

Nombre et durée des apparitions

Bernadette Soubirous aura 18 Apparitions pendant 5 mois dont 12 les premiers quinze jours.Bernadette employait surtout le terme occitan« aquerò » (c’est-à-dire « cela ») pour désigner l’objet de sa vision.

Emplacement des apparitions

Une grotte dans un rocher situé le long du Gave, un torrent de montagne, au lieu dit «  Massabielle », près de Lourdes. 

Récit des Apparitions 

Du 14 Février 1858 au 16 juillet 1858 

1ère apparition : Jeudi 11 février 1858. 

Pour aider ses parents, Bernadette se chargeait notamment d’aller chercher du bois mort sur les berges du Gave. Accompagnée de sa sœur et d’une amie, Bernadette se rend à Massabielle, le long du Gave, pour ramasser des os et du bois mort. Enlevant ses bas pour traverser le ruisseau et aller dans la Grotte, elle entend un bruit qui ressemblait à un coup de vent ; elle lève la tête vers la grotte qui se trouvait là et y apercevra une forme blanche : la Vierge. « J’aperçus une dame vêtue de blanc : elle portait une robe blanche, un voile blanc également,  une ceinture bleue, et une rose jaune sur chaque pied. » Elle fait le signe de la Croix et récite le chapelet avec la Dame. 
La prière terminée, la Dame disparaît brusquement. 

2ème apparition : Dimanche 14 février 1858. 

Bernadette ressent une force intérieure qui la pousse à retourner à la Grotte malgré l’interdiction de ses parents. Sur son insistance, sa mère l’y autorise ; après la première dizaine de chapelet, elle voit apparaître la même Dame. Elle lui jette de l’eau bénite.  La Dame sourit et incline la tête. La prière du chapelet terminée, elle disparaît. 

3ème apparition : Jeudi 18 février 1858.

Pour la première fois, la Dame parle. Bernadette lui présente une écritoire et lui demande d’écrire son nom. Elle lui dit : « Ce n’est pas nécessaire. »  et elle ajoute :  « Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde mais dans l’autre. Voulez-vous avoir la grâce de venir ici pendant quinze jours

4ème apparition : Vendredi 19 février 1858.

Bernadette vient à la Grotte avec un cierge béni et allumé. C’est de ce geste qu’est née la coutume de porter des cierges et de les allumer devant la Grotte. 

5ème apparition : Samedi 20 février 1858. 

La Dame lui a appris une prière personnelle. A la fin de la vision, une grande tristesse envahit Bernadette. 

6ème apparition : Dimanche 21 février 1858.

La Dame se présente à Bernadette le matin de bonne heure. Une centaine de personnes l’accompagne. Elle est ensuite interrogée par le commissaire de police Jacomet. Il veut lui faire dire ce qu’elle a vu.  Bernadette ne lui parle que d’ « aquero » (cela) 

7ème apparition : Mardi 23 février 1858 

Entourée de cent cinquante personnes, Bernadette se rend à la Grotte. L’Apparition lui révèle un secret « rien que pour elle ». 

8ème apparition : Mercredi 24 février 1858 

Message de la Dame : « Pénitence! Pénitence! Pénitence! Priez Dieu pour les pécheurs !  Allez baiser la terre en pénitence pour les pécheurs !  » 

Neuvième Apparition : Jeudi 25 Février 1858.

Trois cents personnes sont présentes.  « Allez boire à la fontaine et vous y laver. Vous mangerez de cette herbe qui est là. »  Bernadette raconte : « elle me dit d’aller boire à la source (…) je ne trouvai qu’un peu d’eau vaseuse. Au quatrième essai je pus boire ; elle me fit également manger une herbe qui se trouvait près de la fontaine puis la vision disparut et je m’en allai » Devant la foule qui lui demande: « Sais-tu qu’on te croit folle de faire des choses pareilles ?  » Elle répond seulement: « C’est pour les pécheurs. »

10ème apparition : Samedi 27 février 1858. 

Huit cents personnes sont présentes. L’Apparition est silencieuse. Bernadette boit l’eau de la source et accomplit les gestes habituels de pénitence.

11ème apparition : Dimanche 28 février 1858. 

Plus de mille personnes assistent à l’extase. Bernadette prie, baise la terre et rampe sur les genoux en signe de pénitence. Elle est ensuite emmenée chez le juge Ribes qui la menace de prison. 

12ème apparition : Lundi 1er mars 1858.

Plus de mille cinq cents personnes sont rassemblées et parmi elles, pour la première fois, un prêtre. Dans la nuit, Catherine Latapie, une amie lourdaise, se rend à la Grotte, elle trempe son bras déboîté dans l’eau de la source : son bras et sa main retrouvent leur souplesse. 

13ème apparition : Mardi 2 mars 1858.

La foule grossit de plus en plus. La Dame lui demande : « Allez dire aux prêtres qu’on vienne ici en procession et qu’on y bâtisse une chapelle. » Bernadette en parle à l’abbé Peyramale, curé de Lourdes. Celui-ci ne veut savoir qu’une chose : le nom de la Dame. Il exige en plus une preuve: voir fleurir le rosier, ou églantier, de la grotte. (on est en hiver)

14ème apparition : Mercredi 3 mars 1858.

Dès 7 heures le matin, en présence de trois mille personnes, Bernadette se rend à la Grotte, mais la vision n’apparaît pas. Après l’école, elle entend l’invitation intérieure de la Dame. Elle se rend à la Grotte et lui redemande son nom. La réponse est un sourire. Le curé Peyramale lui redit : « Si la Dame désire vraiment une chapelle, qu’elle dise son nom et qu’elle fasse fleurir le rosier de la Grotte. « 

15ème apparition : Jeudi 4 mars 1858. 

La foule toujours plus nombreuse (environ huit mille personnes) attend un miracle à la fin de cette quinzaine. La vision est silencieuse. Le curé Peyramale campe sur sa position. Pendant 20 jours, Bernadette ne va plus se rendre à la Grotte, elle n’en ressent plus l’irrésistible invitation.

16ème apparition : Jeudi 25 mars 1858. 

La vision révèle son nom, mais le rosier (ou églantier) sur lequel elle pose les pieds au cours de ses Apparitions ne fleurit pas. Bernadette raconte :  « Elle leva les yeux au ciel, joignant en signe de prière ses mains qui étaient tendues et ouvertes vers la terre et me dit : « Je suis l’Immaculée Conception » [« que soy era immaculada councepciou »] La jeune voyante part en courant et répète sans cesse, sur le chemin, des mots qu’elle ne comprend pas. Ces mots troublent le brave curé. Bernadette ignorait cette expression théologique.  Quatre ans plus tôt, en 1854, le pape Pie IX en avait fait une vérité certaine de la foi catholique : un dogme.

17ème apparition : Mercredi 7 avril 1858. 

Pendant cette Apparition, Bernadette tient son cierge allumé. La flamme entoura longuement sa main sans la brûler. Ce fait est immédiatement constaté par le médecin, le docteur Douzous.

18ème apparition et dernière apparition : jeudi 16 juillet 1858.

Bernadette ressent le mystérieux appel de la Grotte,  mais son accès est interdit et fermé par une palissade.  Elle se rend donc en face, de l’autre côté du Gave. Elle voit le Vierge qui se présente à elle sous l’apparence de Notre Dame du Mont Carmel*. « Il me semblait que j’étais devant la grotte, à la même distance que les autres fois,  je voyais seulement la Vierge, jamais je ne l’ai vue aussi belle ! »

Notre Dame du mont Carmel

Notre-Dame du Mont-Carmel (ou Notre-Dame du Carmel) est l’un des divers noms de la Vierge Marie. Sa dénomination procède du mont Carmel, en Terre Sainte

Notre-Dame du Mont-Carmel et les Saints du Carmel (Simon Stock, Ange de Jérusalem, Marie-Madeleine de Pazzi, Thérèse d’Avila) par Pietro Novelli, 1641Par Pietro Novelli — http://santiebeati.it/immagini/?mode=view&album=51875&pic=51875B.JPG&dispsize=Original&start=0, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3779089

Le mont Carmel, en hébreu Har HaKarmel, littéralement en français « le vignoble de Dieu », est une montagne côtière d’Israël surplombant la mer Méditerranée. La ville de Haïfa se trouve en partie sur le flanc du mont Carmel, ainsi que quelques petites villes, comme Nesher ou Tirat Carmel. Dès le douzième siècle, des hommes vivent en ermites à la recherche de Dieu dans les grottes du Mont Carmel. Les premiers ermites consacrèrent à la Vierge Marie la petite église qu’ils construisaient « au milieu de leurs cellules », signifiant ainsi qu’ils choisissaient Marie comme « patronne » de leur communauté naissante. Et peu de temps après leur arrivée en Europe, ils se firent appeler « Frères de Sainte-Marie du Mont Carmel ». La famille carmélitaine comprend les Frères Carmes, qui sont à l’origine de l’Ordre du Carmel au XIIIe siècle, les moniales Carmélites, fondées au XVe siècle, des laïcs, des congrégations religieuses de style varié, et aussi des associations et communautés diverses. Aux XVIe siècle en Espagne, Thérèse de Jésus (d’Avila) et Jean de la Croix initient une réforme qui aboutit à la séparation entre les réformés (ou déchaussés) et ceux qui poursuivent l’« antique observance ». Sainte Thérèse d’Avila définit l’Ordre du Carmel comme « l’Ordre de Notre-Dame ».

IV – Analyse de l’Apparition

Apparence de la Vierge

« J’aperçus une dame vêtue de blanc : elle portait une robe blanche, un voile blanc également, une ceinture bleue et une rose jaune sur chaque pied. » A la dix huitième apparition, Bernadette raconte : « Il me semblait que j’étais devant la grotte, à la même distance que les autres fois, je voyais seulement la Vierge, jamais je ne l’ai vue aussi belle ! ».

Attitudes de la Vierge

Bernadette fait le signe de la croix et récite le chapelet avec la Dame. Deuxième apparition. Quand Bernadette lui jette de l’eau bénite, la Dame sourit et incline la tête. A la cinquième apparition, la Dame a appris une prière personnelle à Bernadette. A la septième apparition, l’Apparition lui révèle un secret « rien que pour elle « . A la dixième apparition, la Vierge reste silencieuse. Elle ne parlera qu’à la troisième apparition. A la onzième apparition, sans doute à la demande de la Vierge, Bernadette prie, baise la terre et rampe sur les genoux en signe de pénitence. A la quatorzième apparition, dès 7 h le matin, Bernadette se rend à la Grotte, mais la vision n’apparaît pas ! Après l’école, elle entend l’invitation intérieure de la Dame. Elle se rend à la Grotte et lui redemande son nom. La réponse est un sourire.

A la quinzième apparition, la foule toujours plus nombreuse (environ huit mille personnes) attend un miracle à la fin de cette quinzaine, mais la Vierge est silencieuse. Pendant vingt jours, Bernadette ne va plus se rendre à la Grotte. A la seizième apparition, la vision révèle enfin son nom, mais le rosier (ou églantier) sur lequel elle pose les pieds au cours de ses Apparitions ne fleurit toujours pas. (c’est une demande de miracle qu’on lui avait faite ) Bernadette raconte : « Elle leva les yeux au ciel, joignant en signe de prière ses mains qui étaient tendues et ouvertes vers la terre, et me dit : Que soy era immaculada councepciou« .

Paroles de la Vierge

Marie parle très peu et seulement lors de 7 apparitions sur un total de 18 ! A la troisième apparition, pour la première fois, la Dame parle. Bernadette lui présente une écritoire et lui demande d’écrire son nom. Elle lui répond : « Ce n’est pas nécessaire. » Elle ajoute : « Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde mais dans l’autre. Voulez-vous me faire la grâce de venir ici pendant quinze jours ? » A la huitième apparition, la Dame dit : « Pénitence ! Pénitence ! Pénitence ! Priez Dieu pour les pécheurs ! Allez baiser la terre en pénitence pour les pécheurs ! « A la neuvième apparition, elle dit : «Allez boire à la fontaine et vous y laver. Vous mangerez de cette herbe qui est là. A la treizième apparition, la Dame lui demande : « Allez dire aux prêtres qu’on vienne ici en procession et qu’on y bâtisse une chapelle ». A la seizième apparition, elle me dit : « Que soy era immaculada councepciou » : Je suis l’Immaculée conception ! 

Messages de la Vierge  

Marie révèle au monde pour la première fois qu’elle est née préservée de la faute originelle. Elle rappelle avec force la nécessité de faire pénitence, pour se sauver, mais surtout sauver l’âme des pécheurs. Les gestes qui nous paraissent effarants qu’elle demande à Bernadette : ramper, manger de l’herbe….nous rappellent que l’important sur terre n’est pas, à travers la symbolique de ces gestes, notre corps et le monde physique, mais le salut de notre âme et celui des autres. En demandant la construction d’une église, elle souligne l’importance de la prière. Dans l’économie de ses mots, la Vierge nous signifie en creux l’importance du silence (donc de la méditation) et du choix des mots.

Cette fois encore – comme à toutes les Apparitions- la Vierge fait preuve de caractère et répond, à sa manière, aux questions ou requêtes qu’on lui pose. Non elle n’écrira pas son nom ; non, l’églantier ne fleurira pas, mais Catherine Latapie verra son bras déboîté reprendre sa souplesse dans l’eau de la source, à la douzième apparition. Car la Vierge est aussi médiatrice de toutes les grâces et pas seulement spirituelles. Enfin, la Vierge rappelle à Bernadette que la vie humaine n’est pas le lieu du bonheur : Bernadette mourra à 35 ans, après avoir passé l’essentiel de sa vie à l’infirmerie du couvent. 

* La Pénitence selon le glossaire de l’église catholique

Faire pénitence, c’est implorer le pardon de Dieu. Le mot s’est peu à peu confondu avec les diverses pratiques de pénitence. Pour l’essentiel, la pénitence vise à la réparation de la faute commise. Elle est le signe de la « conversion » à laquelle le Christ nous a tous appelés : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle » (Mc 1, 15).

Eléments supra naturels

La flamme du cierge ne brule pas les mains de Bernadette. 

Les 70 guérisons inexpliquées de personnes ayant manifesté une dévotion envers la Vierge de Lourdes. ( reconnues officiellement après enquête)

Le corps non perverti par la corruption de Bernadette Soubrirous. 

Marie parle le patois de Bernadette 

Marie confirme le dogme de l’Immaculée conception reconnue par le pape en 1854, quatre ans plus tôt.

La guérison du bras déboité de Catherine Latapie

Eléments conformes aux autres apparitions 

La  prière personnelle apprise à Bernadette 

La découverte d’une source

L’apparition dans une grotte 

Des guérisons miraculeuses

Le choix d’une jeune fille pauvre et humble

Le secret révélé aux voyants « rien que pour eux »

Bâtir une chapelle et y venir en procession

L’appel à la prière et à la pénitence, pour sauver les pécheurs.

Comme aux enfants de Fatima, la Vierge ne promet pas à Bernadette d’être heureuse « ici bas ». 

Lors de la 17 ème Apparition, Bernadette tient son cierge allumé. La flamme entoure longuement sa main sans la brûler. Ce fait est immédiatement constaté par le médecin, le docteur Douzous.

Marie s’exprime dans le patois local. 

Eléments spécifiques

Le « coup de vent » du Jeudi 11 Février signale l’apparition de la Vierge. (Le vent, pour les chrétiens, est un des «  signes » de la présence de l’Esprit saint.)

Marie demande à Bernadette de faire des gestes de pénitence : ramper, baiser la terre, manger de l’herbe.  

A noter l’exquise politesse de la Vierge envers une enfant de 14 ans : « Voulez-vous me faire la grâce de venir ici pendant quinze jours ? »

Lien avec d’autres apparitions 

La révélation de l’Immaculée conception confirme les mots inscrits sur la médaille miraculeuse vue par Catherine Labouré à Paris, rue du bac, en 1830 : «  Ô Marie conçue sans péché, priez pour nous qui avons recours à vous »

A San Nicolas de los Arroyos (Argentine), le 11 Janvier 1989, la Vierge dit à la voyante : Gladys Quiroga de Mota, « qu’elle apporte un peu du ciel de Lourdes. 

Le premier message de la Vierge à Ida Peerdeman à Amsterdam, a été donné le 25 mars 1945, fête de l’Annonciation, et également jour anniversaire de celui où la « Belle Dame » de Lourdes (1858) révélait solennellement son identité en patois des Pyrénées, à Bernadette Soubirous: «Que soy era Immaculada Councepciou !» (en français : « Je suis l’Immaculée Conception »).

Comme on le verra régulièrement, les apparitions de la Vierge se confortent les unes les autres : l’espace temps de Marie n’est pas le nôtre ! 

V- Reconnaissance et sanctuaires 

Reconnaissance

Suscitant de vives polémiques, les apparitions, que seule la jeune fille vit, furent rapidement l’objet d’enquêtes et de contre-enquêtes. Une commission d’enquête, mise en place par l’évêque de Tarbes, en juillet 1858, se prononce en faveur de ces apparitions le 18 janvier 1862, (soit quatre ans plus tard). Au nom de toute l’Église, l’évêque du lieu, Mgr Laurence, publia un mandement par lequel il reconnaissait officiellement les apparitions de Lourdes : « Nous sommes […] convaincus que l’Apparition est surnaturelle et divine, et que, par conséquent, ce que Bernadette a vu, c’est la Très Sainte Vierge. » La Vierge y est depuis lors honorée sous le vocable « Notre-Dame de Lourdes ».

Sanctuaire (s)

Au cours d’une de ces apparitions, Bernadette a creusé le sol pour y prendre de l’eau. L’eau de cette source est rapidement réputée miraculeuse et il commence à être question de guérisons. S’en tenant à ce qu’elle avait vu et entendu, Bernadette niera avoir été témoin de guérisons ou y avoir contribué : « On m’a dit qu’il y avait eu des miracles, mais à ma connaissance, non », déclare-t-elle en septembre 1858. Dans un contexte post-révolutionnaire de vives polémiques sur les questions religieuses et, quelques années après les apparitions mariales de la rue du Bac et de la Salette, celles de Lourdes suscitent un engouement populaire important et croissant.

La presse nationale commence à s’y intéresser, durant l’été 1858, notamment avec la publication, par Louis Veuillot, d’un article très remarqué dans L’Univers. Le préfet de Tarbes, suivant les consignes du ministère des Cultes, maintient une interdiction d’accès à la grotte jusqu’en octobre 1858. L’aménagement de la grotte et la construction d’une basilique sur le rocher qui la surplombe commencent en 1862. Depuis, les sanctuaires de Lourdes constituent le plus grand centre de pèlerinage catholique français.

Les sanctuaires comprennent la grotte, lieu des apparitions, la basilique de l’Immaculée-Conception, la basilique du Rosaire, les abords du gave, une esplanade, la basilique Saint-Pie X, une prairie, un accueil pour les malades, les fontaines, les piscines, l’église Sainte-Bernadette, un chemin de croix monumental et nombre de bâtiments de service. Les principaux éléments de cet ensemble de 52 hectares (et notamment les trois basiliques et l’Esplanade du Rosaire) sont situés sur la rive gauche du Gave de Pau qui fait une boucle au niveau du pont Saint-Michel, mais le domaine s’étend aussi largement sur la rive droite en aval de ce pont.

Le centre de pèlerinage accueille chaque année 6 millions de pèlerins ou visiteurs venus du monde entier selon le secrétariat général des sanctuaires, dont environ 60 000 malades et invalides. C’est le troisième lieu de pèlerinage catholique, en fréquentation, après le Vatican et la basilique Notre-Dame de Guadalupe de Mexico. Avec un parc hôtelier de plus de 12 000 chambres, Lourdes est la deuxième ville hôtelière de France, après Paris, mais troisième en nombre d’hôtels après Nice.

Le pape Jean Paul II à la grotte en 1983
Par Ireneed — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=20482345

70 guérisons inexpliquées sur 7000 dossiers déposés y ont été recensées. Six personnes affirment avoir été guéries par l’intercession de Notre-Dame de Lourdes alors qu’elles n’étaient pas venues à Lourdes.La majorité des personnes a été guérie au contact de l’eau de Lourdes (50), la plupart aux piscines du Sanctuaire.

*Les sept dernières guérisons 

  1. Serge PERRIN du Lion d’Angers (France). Hémiplégie droite itérative, avec lésions oculaires, par troubles circulatoires carotidiens bilatéraux. 41 ans au 01-05-1970. Diocèse et date de reconnaissance : Angers 17-06-1978.
  2. Delizia CIROLLI de Paternò (Italie). Sarcome d’Ewing du genou droit. 12 ans au 24-12-1976. Diocèse et date de reconnaissance : Catania (Italie) 28-06-1989.
  3. Jean-Pierre BÉLY de La Couronne (France). Sclérose en plaques évolutive depuis 15 ans. 51 ans au 9.10.1987. Diocèse et date de reconnaissance : Angoulême 9.02.1999
  4. Anna SANTANIELLO de Salerne (Italie). Décompensation cardiaque par maladie mitrale suite à un rhumatisme articulaire aigu. 41 ans au 19-08-1952. Diocèse et date de reconnaissance : Salerne (Italie) 21-09-2005
  5. Sœur Luigina TRAVERSO de Novi Ligure (Italie). Paralysie de la jambe gauche (lombosciatique paralysante sur méningocèle). 30 ans au 23-07-1965. Diocèse et date de reconnaissance : Casale-Monferrato (Italie) 11-10-2012
  6. Danila CASTELLI de Bereguardo (Italie). Hypertension artérielle avec de graves et récurrentes crises. 43 ans au 04-05-1989. Diocèse et date de reconnaissance : Pavia (Italie) 20-06-2013
  7. Plus d’attelle, de pied tordu, d’antalgique. Envolées aussi les séquelles neurologiques. Bernadette MORIAU, religieuse de Beauvais au prénom prédestiné, est devenue officiellement ce dimanche 11 Février 2018, à 78 ans, la 70e miraculée de Lourdes. Sa guérison a eu lieu 11 juillet 2008. C’est donc après de dix ans d’enquête du Bureau des constatations médicales du Sanctuaire de Lourdes que les autorités religieuses ont franchi le pas. Le miracle s’est produit quelques jours à peine après son retour d’un pèlerinage dans la cité mariale. A l’époque sœur Bernadette, infirmière de profession, vit un véritable calvaire. Elle souffre depuis l’âge de 26 ans d’une maladie invalidante des lombaires. Elle a subi de nombreuses opérations chirurgicales, mais rien n’y avait fait. La dernière guérison reconnue datait de 2013. Depuis 1862, 80 % des 70 miracles de lourdes ont concerné des femmes. Mais jusqu’ici aucune ne se prénommait Bernadette.
Statue de Notre Dame de lourdes

L’annonce faite à Marie de Paul Claudel

L’Annonce faite à Marie est un « mystère » en quatre actes et un prologue de Paul Claudel créé le 22 décembre 1912 par la troupe du théâtre de l’Œuvre (salle Malakoff) dans une mise en scène d’Aurélien Lugné-Poe

Dans un « Moyen Âge de convention », Violaine, fille d’Anne Vercors, et fiancée à Jacques Hury, rencontre l’architecte Pierre de Craon, qui l’a autrefois désirée et a, depuis, contracté la lèpre. Violaine consent à lui donner, par compassion et charité, un baiser d’adieu. Mais la scène a été surprise par sa sœur Mara, amoureuse de Hury, et celle-ci va tout tenter pour nuire à sa rivale. C’est à ce moment que le père, Anne, annonce son intention subite d’abandonner la prospérité du domaine familial pour se rendre en Terre sainte laissant à Jacques le patronage de la maison et la main de Violaine.

À la suite du baiser donné à Pierre de Craon, Violaine contracte également la lèpre et, dénoncée par sa sœur, elle se voit reniée par les siens et abandonnée par son fiancé qui l’envoie dans une léproserie et épouse Mara. Elle se retire dans la forêt malade pour se vouer à Dieu. Mais voici que meurt l’enfant né du mariage de Mara et de Jacques. Désespérée, Mara va supplier la lépreuse dans sa caverne durant la nuit de Noël : elle ne l’aime pas, mais elle a foi dans la vertu de sa sainteté qui peut obtenir de Dieu un miracle. Violaine l’associe à ses prières et ressuscite l’enfant dont les yeux prennent alors la couleur des yeux bleus de Violaine alors qu’ils étaient noirs comme Mara. 

À l’acte suivant, Violaine est tuée par Mara, toujours jalouse et, avant de mourir, elle obtient pour cette dernière le pardon de son père et de son mari. Et, tandis que la lèpre de Pierre de Craon a été mystérieusement guérie, Mara trouve enfin la paix dans le pardon, au son des cloches de l’Angélus dont le premier versicule donne son titre à la pièce : Angelus Domini nuntiavit Mariae (« L’ange du Seigneur apporta l’annonce à Marie »). L’histoire de cette jeune fille Violaine devenant progressivement une sainte, assimilée à la Vierge Marie donne finalement la signification de ce mystère : la « possession d´une âme par le surnaturel », comme l´a décrit Claudel lui-même.

Mexique 1531 Notre Dame de Guadalupe

I – Généralités 

Pays de l’apparition

Mexique

Site 

Le Tepeyac (appelé anciennement Tepeyacac et Tepeaquilla) est une colline située au nord de la ville de Mexico. Elle forme l’extrémité orientale de la chaîne montagneuse de la Sierra de Guadalupe, qui ferme la limite septentrionale de la vallée de Mexico. À l’époque précolombienne, il y avait au Tepeyac un petit oratoire dédié à Tonantzin et un petit village relié à Tenochtitlán par une chaussée qui traversait l’ancien lac Texcoco et rejoignait l’île principale à Tlatelolco. Le Tepeyac est célèbre pour avoir été, suivant la foi catholique, l’endroit où Notre-Dame de Guadalupe apparut à l’Indigène Juan Diego Cuauhtlatoatzin.

Au pied du coteau se trouve la basilique Notre-Dame de Guadalupe qui reçoit chaque année, et tout particulièrement le 12 décembre, des millions de pèlerins. Sur le haut de la colline, l’esplanade de la chapelle du Cerrito offre, par temps clair, l’une de la plus belle vue sur la vallée de Mexico. Le parc national El Tepeyac, qui comprend aussi une partie des collines de Santa Isabel et de Guerrero, couvre les flancs nord et ouest de la colline.

Désignation

Notre Dame de Guadalupe, patronne des Amériques (Guadalupe veut dire en langue aztèque celle qui écrase le serpent) 

Le contexte

En 1487, durant une longue cérémonie qui dura 4 jours lors de la consécration d’un nouveau temple à Tenochtitlan, quelque 80.000 captifs furent tués en sacrifice humain. Chaque année les Aztèques offraient au moins 20.000 hommes, femmes et enfants en sacrifice humain à leurs dieux féroces et assoiffés de sang. Francisco Hernández de Córdoba et Juan de Grijalva explorèrent les côtes méridionales du Mexique, respectivement en 1517 et 1518. Le conquistador Hernán Cortés envahit le pays sous bannière espagnole en 1519, après avoir débarqué à proximité de l’actuelle Veracruz.

Il baptisa de fait cette ville le long de la côte Villa Rica de la Vera Cruz. À cette époque, les Aztèquesétaient le groupe dominant dans la population locale. Ils prirent d’abord les conquistadors espagnols, conformément aux anciennes légendes toltèques, pour des envoyés des dieux. Pour cette raison, les Aztèques n’opposèrent initialement que peu de résistance à l’avance des conquistadors, mais plus tard, ils marquèrent leur opposition lorsqu’ils se rendirent compte qu’ils n’étaient pas les messagers divins d’abord admirés.

Après plusieurs batailles, au cours desquelles les armées espagnoles furent plusieurs fois proches de la défaite (notamment lors de la Noche Triste du 30 juin 1520), la capitale aztèque de Tenochtitlan fut attaquée par une alliance entre les Espagnols et les Tlaxcaltèques (les principaux ennemis des Aztèques), qui entamèrent le siège. Les Aztèques furent défaits en 1521 et leur capitale rasée. Moins de 20 ans plus tard, neuf millions d’habitants qui avaient professé pendant des siècles une religion polythéiste et prônant des sacrifices humains les plus cruels, sont convertis au christianisme.

On estime qu’avant l’arrivée des Européens, le Mexique central comptait 25 millions d’habitants. Il n’en restait plus qu’un million vers 1650. Les Espagnols étendirent rapidement leur domination au-delà des frontières de l’empire aztèque. Les Tarasques, effrayés par le sort des Aztèques, se soumirent sans combattre. En 1530, les Espagnols exécutèrent leur dernier souverain. Dans certaines régions, la conquête fut fragile. L’apparition eut lieu en, Décembre 1531.

II – Le voyant  

Par Hajor — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=130002

Juan Diego Cuauhtlatoatzin, né en 1474 et décédé le 30 mai 1548 à Mexico, est le premier chrétien amérindien déclaré saint par l’Église catholiqueCanonisé par le pape Jean-Paul II en 2002, il est liturgiquement commémoré le 9 décembre par l’Église dont la tradition en fait un Indien mexicain de la tribu des Nahuas qui aurait assisté en 1531 à l’apparition de la Vierge Marie sous la forme de la Vierge de Guadalupe. Selon la tradition, il est né en 1474 dans l’État de Mexico, à Cuautitlán, une ville aztèque à 20 km au nord de Tenochtitlan (aujourd’hui Mexico). Le nom donné à sa naissance – Cuauhtlatohuac – signifie « aigle parlant », en langue nahuatl. Lors de l’arrivée des conquistadors espagnols et de la chute de l’empire aztèque, il se convertit au catholicisme vers 1524 ou 1525 et prend le nom de Juan Diego.

Il se retire alors dans une mission catholique de frères franciscains à Tolpetlac. Juan Diego meurt à Mexico, le 30 mai 1548, à l’âge de 74 ans. Il est béatifié en 1990 et canonisé en 2002 par le pape Jean-Paul II. Aujourd’hui, Notre-Dame de Guadalupe est considérée comme la sainte patronne du Mexique et est toujours vénérée par de nombreux catholiques au Mexique et en Amérique latine. Le lieu des apparitions mariales est un centre de pèlerinage très fréquenté.

III – L’apparition (généralités) 

Date 

Le 12 décembre 1531

Nombre et Durée

Quatre fois à Juan Diego et une fois à son oncle Juan Bernardino. 

Emplacement des apparitions

Le Mexique, pays de l’apparition
Fontaine commémorative des apparitions de Tepeyac
L’auteur n’a pas pu être identifié automatiquement. Il est supposé qu’il s’agit de : Mnts (étant donné la revendication de droit d’auteur). « Travail personnel » supposé (étant donné la revendication de droit d’auteur)., CC BY-SA 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=567266

Récit 

Lors d’une promenade le 12 décembre 1531, la Vierge Marie lui serait apparue sur la colline de Tepeyac, et lui aurait parlé en langue nahuatl. Elle lui aurait alors demandé de construire une église en ce lieu. Juan Diego va en parler à un évêque espagnol, Juan de Zumárraga, mais celui-ci ne le croit pas, et lui demande un signe probant de la demande mariale. La Vierge Marie apparaît alors une deuxième fois à Juan Diego et l’invite à aller cueillir les roses sur la colline (alors qu’on était en plein hiver). Juan Diego trouve les roses et les présente à l’évêque.

Lorsque celles-ci tombent de la tunique, une icône de la Vierge reste imprimée sur son tilma (vêtement de pauvre qualité fait à base de cactus qui aurait dû se détériorer en 20 ans).L’évêque est alors convaincu de l’authenticité de la démarche du religieux amérindien. En 2018, après 487 ans, il ne montre aucun signe de détérioration et défie toutes les explications scientifiques de son origine.  Apparemment, l’image reflète même dans ses yeux ce qui était en face d’elle en 1531. 

Traduction française du récit 

Dix ans après la prise de Mexico, la guerre prit fin et la paix régna parmi le peuple ; en ce temps là, en l’année quinze cent trente et un, dans les premiers jours du mois de décembre, vivait un pauvre Indien appelé Juan Diego, connu comme étant un natif de Cuautitlan. 

Première apparition 

Un samedi, tout juste avant l’aube, il était en route pour le culte divin et pour ses propres affaires. Lorsqu’il arriva au pied de la colline connu sous le nom de Tepeyacac, le jour parut et il entendit chanter sur la colline, comme un chant de différents beaux oiseaux. Occasionnellement la voix des chanteurs s’arrêtait et il semblait que l’écho répondit. Le chant, très doux et délicieux, était plus beau que celui du coyoltotol, du tzintizcan et d’autres beaux oiseaux. Juan Diego s’arrêta pour voir et se dit à lui-même : “Par chance, suis-je digne de ce que j’entends? Peut-être suis-je en train de rêver? Suis-je réveillé?

Où suis-je ? Peut-être suis-je dans ce paradis terrestre dont nous parlaient nos ancêtres? Peut-être suis-je maintenant au ciel?” Il regardait vers l’est, vers le haut de la colline d’où venait ce précieux chant céleste ; puis, subitement le chant s’arrêta et le silence régna. Il entendit alors une voix venant de la colline qui lui disait : “Juanito, Juan Dieguito” ; il s’aventura alors vers l’endroit où on l’appelait. Il n’était pas le moindrement effrayé ; au contraire, il jubilait.

Il grimpa alors la colline pour voir d’où on l’appelait. Quand il atteignit le sommet il vit une Dame qui s’y tenait debout et qui lui dit de s’avancer. S’approchant d’elle, il s’émerveilla de sa grandeur surhumaine ; ses vêtements brillaient comme le soleil ; la falaise sur laquelle reposaient ses pieds étincelait de lumière comme entourée d’un bracelet de pierres précieuses, et la terre resplendissait comme un arc en ciel. Les mezquites, nopales et autres mauvaises herbes qui poussent à cet endroit, paraissaient comme des émeraudes, leurs feuillages comme des turquoises, leurs branches et leurs épines brillaient comme de l’or. Il s’inclina devant elle et entendit sa parole, douce et courtoise, comme quelqu’un qui vous charme et vous enchante profondément.  Elle lui dit : “Juanito, le plus humble de mes fils, où vas-tu?” Il lui répondit : “Madame et enfant, je dois atteindre ton “église à Mexico, Tlatilolco, afin de poursuivre les choses divines qui nous sont enseignées et données par nos prêtres et nos délégués et Notre Seigneur. » 

Elle lui parla alors ainsi : « Sache et comprends bien, le plus humble de mes fils, que je suis la toujours vierge Sainte Marie, Mère du Vrai Dieu pour qui nous existons, du Créateur de toutes choses, Seigneur du ciel et de la terre. J’aimerais qu’une église soit érigée ici, rapidement, afin que je puisse vous montrer et vous donner mon amour, ma compassion, mon aide et ma protection, parce que je suis votre mère miséricordieuse, à vous, à tous les habitants de cette terre et à tous ceux qui m’aiment, m’invoquent et ont confiance en moi. J’écoute leurs lamentations et je remédie à leurs misères, leurs détresses et leurs peines.

Afin d’accomplir ce qu’exige ma clémence, va au palais de l’évêque de Mexico et tu lui diras que je manifeste un grand désir qu’ici, sur cette plaine, une église soit construite en mon honneur ; tu lui raconteras dans les moindres détails tout ce que tu as vu et admiré et ce que tu as entendu. Sois assuré que je te serai extrêmement reconnaissante et que je te récompenserai, parce que je te rendrai heureux et digne de récompense pour les efforts et la fatigue que tu vas endurer pour cette mission. Voilà, tu as entendu mes instructions, mon humble fils, va et fais tous tes efforts. » A cet instant, il s’inclina devant elle et dit : “ Madame, Je vais obéir à tes instructions ; maintenant je dois te quitter, moi, ton humble serviteur. » 

Deuxième apparition

Ayant pénétré dans la ville, il se rendit directement et sans délai, au palais épiscopal ou venait d’être nommé un nouveau prélat, le Père Juan de Zumarraga, un religieux Franciscain. A son arrivée, il essaya de le voir ; il plaida auprès des serviteurs afin qu’ils annoncent sa visite, et après une longue attente il fut informé que l’évêque avait ordonné de le faire entrer. En entrant, il s’inclina et s’agenouillant devant l’évêque, lui transmit le message de la Dame du ciel. Il lui raconta aussi tout ce qu’il avait admiré, vu et entendu. Après avoir écouté son bavardage et son message l’évêque trouva cela incroyable ;

il lui dit alors : ” Tu repartiras, mon fils et je t’écouterai à mon gré. Je reprendrai tout depuis le début et réfléchirai sur les voeux et les désirs pour lesquels tu es venu.” Il s’en alla et paraissait triste car le message n’avait pas été accompli sous toutes ses formes. Il rentra le même jour et revint directement au haut de la colline et rencontra la Dame du ciel qui l’attendait à la même place où il l’avait vue la première fois. La voyant, il se prosterna devant elle et lui dit : “Madame, la plus petite de mes filles, mon enfant, j’ai été là où tu m’as envoyé afin de me conformer à tes instructions. Avec beaucoup de difficultés j’ai pénétré dans le bureau du prélat. Je l’ai vu et lui a fait part de ton message, comme tu me l’avais commandé. 

Il m’a dit : “Tu reviendras et je t’entendrai à mon gré. Je reprendrai tout depuis le début et réfléchirai sur le voeu et le désir qui t’ont amené. ” J’ai parfaitement compris de par la façon dont il m’a répondu qu’il pensait que ton désir d’avoir une église qui te soit consacrée est une invention de ma part, et que ce n’est pas ton ordre, aussi je te supplie fortement, Madame, de confier l’accomplissement de ton message à quelqu’un d’important, de connu qui inspire le respect et l’estime, afin qu’on le croie ; parce que je ne suis rien, je suis une petite ficelle, une minuscule échelle, une queue, une feuille et toi, mon enfant, la plus petite de mes enfants, ma Dame, tu m’as envoyé à une place que je ne fréquente jamais ni ne m’y repose. Je t’en prie, pardonne moi ce grand désagrément et ne sois pas irritée, Madame. » 

La Vierge Marie répondit : ” Ecoute, ô le moindre de mes fils, tu dois comprendre que j’ai de nombreux serviteurs et messagers à qui je peux confier l’accomplissement de mon message et l’exécution de mon désir, mais c’est toi précisément que je sollicite et demande de m’aider afin que par ta médiation mon voeu soit accompli. Je t’implore ardemment, toi le moindre de mes fils, et avec fermeté je t’ordonne d’aller demain voir l’évêque. Tu y vas en mon nom et tu lui fais connaître mon vœu intégral selon lequel je lui demande de commencer la construction d’une église. Dis-lui aussi que c’est Moi, en personne, la toujours-vierge, Sainte Marie, Mère de Dieu qui t’ai envoyé”.

Juan Diego répondit : “Madame, mon enfant, je ne veux pas te faire de la peine. Joyeusement et de plein gré j’obéirai à tes instructions. Sous aucune condition je ne manquerai de le faire ; j’irai accomplir ton désir car non seulement le chemin est pénible mais peut-être que je ne serai pas écouté avec plaisir, ou si on m’écoute on ne me croira peut-être pas. Demain après-midi, au coucher du soleil, je reviendrai te porter la réponse de ton message au prélat. Je prends maintenant congé de toi, le plus petite de mes enfants, mon Enfant et Madame. » Il descendit alors afin de s’acquitter de sa tâche et prit l’allée qui mène tout droit à Mexico. 

Troisième apparition 

Le jour suivant, il quitta la maison avant l’aube, et prit le chemin de Tlatilolco, afin d’être instruit des choses divines et d’être présent à l’appel, après quoi il irait voir le prélat. Vers dix heures, rapidement, après avoir assisté à la Messe et avoir inscrit sa présence, il s’en alla quand la foule se fut dispersée. Sur l’heure Juan Diego se rendit au palais de l’évêque. A peine fut-il arrivé qu’il essaya ardemment de voir l’évêque. Après encore beaucoup de difficultés il parvint à le voir. Il s’agenouilla à ses pieds. Il s’attrista et pleura pendant qu’il exposait les instructions de la Dame du ciel, demandant à Dieu de lui accorder qu’on croie à son message et au voeu de l’Immaculée pour qu’un temple soit construit là où elle le voulait. 

L’évêque, afin de se rassurer, lui posa beaucoup de questions, lui demandant où il l’avait vue et comment elle était. Il décrivit le tout à la perfection à l’évêque. Malgré les explications précises de son apparence et de tout ce qu’il avait vu et admiré, qui, en soi, indiquait qu’elle était la toujours-vierge sainte Mère du Sauveur, Notre Seigneur Jésus-Christ, il ne lui accorda néanmoins aucun crédit lui disant que pour sa requête il lui fallait faire ce qui lui était demandé mais de plus qu’un signe était nécessaire afin qu’il puisse croire qu’il était vraiment envoyé par une Dame du ciel. Juan Diego dit alors à l’évêque : 

Quatrième apparition

Il m’a reçu bienveillamment et m’a écouté attentivement mais sa réponse laissait entendre qu’il ne me croyait pas.  Repose-toi entre-temps”. Il s’en alla se reposer chez lui.  “Monseigneur, écoutez ! Quel doit être le signe que vous demandez? Car j’irai le demander à la Dame du ciel qui m’a envoyé vers vous.” L’évêque voyant qu’il acceptait sans aucun doute et ne se rétractait pas, le renvoya. Il ordonna immédiatement à quelques personnes de son entourage, en qui il pouvait avoir confiance, de le suivre et de surveiller où il allait, qui il voyait et avec qui il parlait. Ceux qui le suivirent le perdirent de vue alors qu’il traversait la ravine près du pont de Tepeyac. Ils cherchèrent partout mais ne purent le retrouver.

Ils revinrent donc non seulement parce qu’ils étaient fatigués mais aussi parce que leurs desseins avaient été déjoués, et cela les avait mis en colère. Et c’est ce qu’ils racontèrent à l’évêque. Pour l’influencer afin qu’il ne crut pas en Juan Diego, ils dirent à l’évêque que Juan Diego le trompait et inventait ce qu’il racontait ou qu’il avait seulement rêvé ce qu’il racontait.  Finalement ils s’arrangèrent pour que, si jamais il retournait, il fût retenu et durement puni afin qu’il cessât de mentir et de tromper. Entre temps, Juan Diego était avec la Bienheureuse Vierge lui rapportant la réponse de Monseigneur l’évêque. 

La Dame, après l’avoir écouté, lui dit : ”Très bien, mon petit, tu repartiras là-bas demain afin de porter à l’évêque le signe qu’il a demandé. Avec cela il te croira et dans son regard il n’y aura ni doute ni soupçon. Et sache, mon petit, que je te récompenserai pour ta sollicitude, tes efforts et ta fatigue à mon égard. Je t’attendrai ici demain.” C’est le jour suivant, un lundi, que Juan Diego devait porter un signe pour qu’on le croie, mais il n’y revint pas parce que, en rentrant chez lui, son oncle, Juan Bernardo, était tombé malade et son état était grave. Il appela d’abord un docteur qui l’aida mais c’était trop tard, son état empirait. A la tombée de la nuit son oncle lui demanda d’aller à l’aube à Tlatilolco et de ramener un prêtre pour le préparer et entendre sa confession, car il était certain qu’il allait mourir et qu’il ne se lèverait plus ni ne guérirait. 

Le mardi, avant l’aube, Juan Diego partit de sa maison pour Tlatilolco pour ramener un prêtre et comme il s’approchait de la route qui rejoint la pente qui mène au sommet de la colline de Tepeyac, vers l’ouest, et où il avait l’habitude de traverser la route, il se dit : “ Si je continue ce chemin, la Dame va sûrement me voir, et je pourrais être retenu afin que je puisse porter le signe au prélat comme convenu ; mais mon premier souci est d’aller rapidement appeler un prêtre car mon oncle l’attend certainement”. Il fit donc le tour de la colline afin qu’il ne puisse être vu par elle qui voit bien partout. Il la vit descendre du haut de la colline et regarder vers là où ils s’étaient  rencontrés précédemment. 

Elle s’approcha de lui au bas de la colline et lui dit” : “Qu’y a-t-il, le moindre de mes fils? Où vas-tu? ” Il s’inclina devant elle et la salua, disant :” Mon enfant, la plus tendre de mes filles, Madame, que Dieu veuille que tu sois satisfaite. Comment vas-tu ce matin? Est-ce que ta santé est bonne, Madame et mon enfant? Je vais te faire de la peine. Sache, mon enfant, qu’un des tes serviteurs, mon oncle, est très malade.

Il a attrapé la peste et est sur le point de mourir. Je dois me hâter vers ta maison à Mexico afin d’appeler un de tes prêtres, aimé de Dieu, pour qu’il entende sa confession et lui donne l’absolution car, depuis notre naissance, nous sommes venus au monde pour nous préserver des oeuvres de la mort. Mais si je pars, je reviendrai ici rapidement afin d’aller porter ton message. Madame, mon Enfant, pardonne moi, sois patiente avec moi pour le moment. Je ne te décevrai pas, la plus petite des mes filles. Demain je viendrai en toute hâte. » 

Après avoir écouté les paroles de Juan Diego, la Très Sainte Vierge répondit : « Ecoute moi et comprends bien, le moindre de mes fils, rien ne doit t’effrayer ou te peiner. Que ton coeur ne soit pas troublé. N’aies pas peur de cette maladie, ni d’aucune autre maladie ou angoisse. Ne suis-je pas là, moi qui suis ta Mère? N’es-tu pas sous ma protection? Ne suis-je pas ta santé? Ne reposes-tu pas heureux en mon sein? 

Que désires-tu de plus? Ne sois pas malheureux ou troublé par quoi que ce soit. Ne sois pas affligé par la maladie de ton oncle, il n’en mourra pas. Sois assuré qu’il est maintenant guéri. » Et à ce moment son oncle fut guéri comme il devait l’apprendre par la suite. Quand Juan Diego entendit ces mots de la Dame du ciel, il était grandement consolé. Il était heureux. Il la supplia de l’excuser afin qu’il aille voir l’évêque et lui porter le signe ou la preuve afin qu’on le croie. La Dame du ciel lui ordonna de grimper au haut de la colline où ils s’étaient précédemment rencontrés. 

Elle lui dit : « Grimpe, ô le moindre de mes fils jusqu’au haut de la colline ; là où tu m’as vue et où je t’ai donné des instructions, tu verras différentes fleurs. Coupe-les, cueille-les, rassemble-les et puis viens les porter devant moi. »Juan Diego grimpa sur la colline immédiatement, et comme il atteignait le sommet il fut stupéfait de voir qu’une telle variété de merveilleux rosiers de Castille était en floraison bien avant la saison où les roses devraient bourgeonner, car hors de saison elles gèleraient. Elles étaient parfumées et recouvertes des gouttes de rosée de la nuit qui ressemblaient à des perles précieuses. 

Il commença immédiatement à les cueillir. Il les assembla et les plaça dans son tilma. Le haut de la colline n’était pas une place où pourrait fleurir n’importe quelle fleur car il y avait beaucoup de rochers, de ronces, d’épines, de nopales et de mezquites. Occasionnellement, de l’herbe poussait mais c’était au mois de décembre quand la végétation n’était pas gelée. Il descendit la colline immédiatement et porta les différentes roses qu’il avait cueillies à la Dame du ciel qui, en les voyant les prit entre ses mains et les plaça à nouveau dans son tilma, lui disant : « ô toi, le moindre de mes fils, cette variété de roses est une preuve et un signe que tu porteras à l’évêque. 

Tu lui diras en mon nom qu’il y verra là mon voeu et qu’il doit s’y conformer. Tu es mon ambassadeur, le plus digne de ma confiance. Je te l’ordonne rigoureusement de ne déplier ton manteau qu’en présence de l’évêque et de lui montrer ce que tu portes. Tu lui raconteras bien tout ; tu lui diras que je t’ai ordonné de grimper au haut de la colline et de cueillir les fleurs ; et aussi tout ce que tu as vu et admiré afin que tu puisses persuader le prélat d’accorder son soutien à ma demande qu’une église soit construite.”Après les conseils de la Dame du ciel, il prit le chemin qui mène directement à Mexico, heureux et sûr du succès, portant avec beaucoup de précaution le contenu de son tilma afin que rien ne s’échappe de ses mains et s’enivrant du parfum de cette variété de belles fleurs. 

Le miracle 

La Vierge de Guadalupe imprimée miraculeusement sur le Tilda de
Juan Diego Cuauhtlatoatzin,
Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1436070

Quand il arriva au palais épiscopal, le majordome vint à sa rencontre ainsi que d’autres serviteurs du prélat. Il les supplia de dire à l’évêque qu’il voulait le voir, mais personne ne voulait le faire ; ils faisaient semblant de ne pas l’entendre, probablement parce qu’il était trop tôt ou parce qu’ils le connaissaient comme étant un importun et qu’il les harcelait ; de plus, leurs collègues leur avaient raconté qu’ils l’avaient perdu de vue quand ils l’avaient suivi. Il attendit longtemps. Quand ils virent qu’il avait attendu longtemps, debout, abattu, ne faisant rien, attendant d’être appelé et paraissant avoir quelque chose dans son tilma, ils s’approchèrent de lui afin de savoir ce qu’il portait. 

Juan Diego voyant qu’il ne pouvait cacher ce qu’il portait et sachant qu’il serait molesté, bousculé, lacéré, ouvrit un peu son tilma là où se trouvaient les fleurs. En voyant cette variété de roses de Castille hors saison, ils furent complètement stupéfaits parce qu’elles étaient si fraîches, en pleine floraison, si parfumées et si belles. Ils essayèrent de s’en emparer et d’en tirer quelques unes mais ne réussirent à aucune des trois fois qu’ils osèrent le faire. Ils ne réussirent pas parce qu’à chaque fois qu’ils essayaient de les prendre, ils ne purent voir les fleurs réelles. A la place elles paraissaient peintes, imprimées ou cousues sur la toile. 

Ils allèrent alors dire à l’évêque ce qu’ils avaient vu, l’informant que l’Indien qui était venu à plusieurs reprises voulait le voir et qu’il avait sûrement une raison pour l’avoir attendu avec anxiété si longtemps et être si désireux de le voir. En entendant cela l’évêque comprit qu’il avait apporté la preuve pour confirmer ses dires afin qu’il se conformât à la requête de l’Indien. Il ordonna de le faire entrer immédiatement. 

Dès son entrée Juan Diego s’agenouilla devant lui comme à l’accoutumée et raconta à nouveau ce qu’il avait vu et admiré ainsi que le message. Il lui dit : ” Monseigneur, j’ai fait ce que tu as commandé, je suis allé dire à mon Ama, ma Dame du ciel, Sainte Marie, précieuse Mère de Dieu que tu as demandé un signe et une preuve afin que tu puisses croire qu’il faut construire une église là où elle l’a demandé ; je lui ai aussi dit que je t’avais donné ma parole que je rapporterais un signe et une preuve de son désir comme tu l’as demandé. Elle se montra sensible et agréa à ta requête. Tôt ce matin elle m’a envoyé te voir à nouveau ; je lui demandais une fois encore le signe afin que tu puisses me croire et elle me dit qu’elle me le donnerait et elle s’y conforma. 

Elle m’envoya au haut de la colline, là où j’avais l’habitude de la voir, pour cueillir une variété de roses de Castille. Après les avoir cueillies je les lui ai portées, elle les a prises de sa main et les a placées dans mon vêtement afin que je te les porte et te les donne en personne. Même si je savais que le haut de la colline n’était pas un endroit où pousseraient des fleurs car il y a beaucoup de rochers, de ronces, d’épines, de nopales et de mezquites, j’avais encore des doutes. Quand je me suis approché du haut de la colline, je vis que j’étais au paradis où il y avait une variété d’exquises roses de Castille, couvertes de brillante rosée et je les ai cueillies immédiatement. Elle m’a dit que je devais te les porter et je me suis exécuté afin que tu puisses voir en elles le signe que tu m’as demandé et te conformer à son vœu ;

Voilà. Reçois les.” Il déplia son vêtement blanc où il avait mis les fleurs et quand toutes les différentes variétés de roses de Castille tombèrent à terre apparut soudain le dessin de la précieuse imagede la toujours vierge Sainte Marie, Mère de Dieu, comme on la voit aujourd’hui dans l’église de Tepeyac, nommé Guadalupe. 

Gros plan de l’image de la Vierge imprimée sur le Tilda de Juan Diego

Quand l’évêque vit l’image, lui et tous ceux présents tombèrent à genoux. On l’admira beaucoup. Ils se levèrent pour la voir, ils tremblèrent et, avec tristesse, ils démontrèrent qu’ils la contemplaient avec leur coeur et leur esprit. L’évêque, avec des larmes de tristesse, pria et implora son pardon pour n’avoir pas accompli son voeu et sa requête. Quand il se releva, il détacha du cou de Juan Diego le vêtement sur lequel apparaissait l’Image de la Dame du ciel. Il le prit et le plaça dans sa chapelle. Juan Diego demeura un jour supplémentaire à l’évêché à la requête de l’évêque. Le jour suivant l’évêque lui dit: « Montre nous où la Dame du ciel désire qu’une église soit construite” Et il invita immédiatement tous ceux présents à s’y rendre. 

IV – Analyse des apparitions 

Apparence de la Vierge 

Quand il atteignit le sommet il vit une Dame. S’approchant d’elle, il s’émerveilla de sa grandeur surhumaine ; ses vêtements brillaient comme le soleil ; la falaise sur laquelle reposaient ses pieds étincelait de lumière comme entourée d’un bracelet de pierres précieuses, et la terre resplendissait comme un arc en ciel. Les mezquites, nopales et autres mauvaises herbes qui poussent à cet endroit, paraissaient comme des émeraudes, leurs feuillages comme des turquoises, leurs branches et leurs épines brillaient comme de l’or. Il s’inclina devant elle et entendit sa parole, douce et courtoise, comme quelqu’un qui vous charme et vous enchante profondément.  « Un grand signe apparut dans le ciel : une femme ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds et, sur la tête, une couronne de douze étoiles. » (Apocalypse 12,1-2 )

Attitudes de la Vierge

Quand il atteignit le sommet il vit une Dame qui s’y tenait debout et qui lui dit de s’avancer. Il descendit la colline immédiatement et porta les différentes roses qu’il avait cueillies à la Dame du ciel qui, en les voyant les prit entre ses mains et les plaça à nouveau dans son tilma. 

Paroles de la Vierge

Elle lui dit : “Juanito, le plus humble de mes fils, où vas-tu?” Elle lui parla alors ainsi : « Sache et comprends bien, le plus humble de mes fils, que je suis la toujours vierge Sainte Marie, Mère du Vrai Dieu pour qui nous existons, du Créateur de toutes choses, Seigneur du ciel et de la terre. J’aimerais qu’une église soit érigée ici, rapidement, afin que je puisse vous montrer et vous donner mon amour, ma compassion, mon aide et ma protection, parce que je suis votre mère miséricordieuse, à vous, à tous les habitants de cette terre et à tous ceux qui m’aiment, m’invoquent et ont confiance en moi. J’écoute leurs lamentations et je remédie à leurs misères, leurs détresses et leurs peines.

Afin d’accomplir ce qu’exige ma clémence, va au palais de l’évêque de Mexico et tu lui diras que je manifeste un grand désir qu’ici, sur cette plaine, une église soit construite en mon honneur; tu lui raconteras dans les moindres détails tout ce que tu as vu et admiré et ce que tu as entendu. Sois assuré que je te serai extrêmement reconnaissante et que je te récompenserai, parce que je te rendrai heureux et digne de récompense pour les efforts et la fatigue que tu vas endurer pour cette mission. Voilà, tu as entendu mes instructions, mon humble fils, va et fais tous tes efforts. »

Après avoir entendu Juanito raconter son entrevue avec l’évêque pour lui faire part de la demande de la Vierge de construire une église,  la Vierge Marie répondit : ” Ecoute, ô le moindre de mes fils, tu dois comprendre que j’ai de nombreux serviteurs et messagers à qui je peux confier l’accomplissement de mon message et l’exécution de mon désir, mais c’est toi précisément que je sollicite et demande de m’aider afin que par ta médiation mon voeu soit accompli. Je t’implore ardemment, toi le moindre de mes fils, et avec fermeté je t’ordonne d’aller demain voir l’évêque. Tu y vas en mon nom et tu lui fais connaître mon vœu intégral selon lequel je lui demande de commencer la construction d’une église. Dis-lui aussi que c’est Moi, en personne, la toujours-vierge, Sainte Marie, Mère de Dieu qui t’ai envoyé”.

Une nouvelle fois, Juan Diego rapporta à la Vierge la demande de l’évêque de lui donner un signe. La Dame, après l’avoir écouté, lui dit : « Très bien, mon petit, tu repartiras là-bas demain afin de porter à l’évêque le signe qu’il a demandé. Avec cela il te croira et dans son regard il n’y aura ni doute ni soupçon. Et sache, mon petit, que je te récompenserai pour ta sollicitude, tes efforts et ta fatigue à mon égard. Je t’attendrai ici demain.” Après avoir écouté les paroles de Juan Diego courant chercher un prêtre pour donner le dernier sacrement à son oncle mourant, la Très Sainte Vierge lui apparut et dit : « Ecoute moi et comprends bien, le moindre de mes fils, rien ne doit t’effrayer ou te peiner. Que ton coeur ne soit pas troublé. N’aies pas peur de cette maladie, ni d’aucune autre maladie ou angoisse. Ne suis-je pas là, moi qui suis ta mère? N’es-tu pas sous ma protection? Ne suis-je pas ta santé? Ne reposes-tu pas heureux en mon sein? 

Que désires-tu de plus? Ne sois pas malheureux ou troublé par quoi que ce soit. Ne sois affligé pas la maladie de ton oncle, il n’en mourra pas. Sois assuré qu’il est maintenant guéri. »La Dame du ciel lui ordonna alors de grimper au haut de la colline où ils s’étaient précédemment rencontrés. Elle lui dit : « Grimpe, ô le moindre de mes fils jusqu’au haut de la colline ; là où tu m’as vue et où je t’ai donné des instructions, tu verras différentes fleurs. Coupe-les, cueille-les, rassemble-les et puis viens les porter devant moi. »Il descendit la colline immédiatement et porta les différentes roses qu’il avait cueillies à la Dame du ciel qui, en les voyant les prit entre ses mains et les plaça à nouveau dans son tilma, lui disant : « ô toi, le moindre de mes fils, cette variété de roses est une preuve et un signe que tu porteras à l’évêque. Tu lui diras en mon nom qu’il y verra là mon voeu et qu’il doit s’y conformer. 

Tu es mon ambassadeur, le plus digne de ma confiance. Je te l’ordonne rigoureusement de ne déplier ton manteau qu’en présence de l’évêque et de lui montrer ce que tu portes. Tu lui raconteras bien tout; tu lui diras que je t’ai ordonné de grimper au haut de la colline et de cueillir les fleurs; et aussi tout ce que tu as vu et admiré afin que tu puisses persuader le prélat d’accorder son soutien à ma demande qu’une église soit construite.”

Messages de la Vierge  

  • Marie se déclare mère aimante, attentive à nos peines. « …parce que je suis votre mère miséricordieuse, à vous, à tous les habitants de cette terre et à tous ceux qui m’aiment, m’invoquent et ont confiance en moi. J’écoute leurs lamentations et je remédie à leurs misères, leurs détresses et leurs peines. » 
  • Elle souhaite que soit édifié un lieu de prière, lieu « d’échange d‘amour réciproque » avec « nous ». « Afin d’accomplir ce qu’exige ma clémence, va au palais de l’évêque de Mexico et tu lui diras que je manifeste un grand désir qu’ici, sur cette plaine, une église soit construite en mon honneur afin que je puisse vous montrer et vous donner mon amour.»
  • Marie a choisi « un petit » pour porter sa demande de construction d’une église. « Tu dois comprendre que j’ai de nombreux serviteurs et messagers à qui je peux confier l’accomplissement de mon message et l’exécution de mon désir, mais c’est toi précisément que je sollicite et demande de m’aider afin que par ta médiation mon voeu soit accompli. »
  • Marie insiste sur « sa » Virginité (qui lui est parfois contestée) : « Dis-lui aussi que c’est Moi, en personne, la toujours-vierge, Sainte Marie, Mère de Dieu qui t’ai envoyé”…Il devrait lui révéler ce qu’il avait vu et lui expliquer de quelle façon elle l’avait guéri miraculeusement et elle voulait être appelée « La toujours vierge Sainte Marie de Guadalupe »

Autres Visions ou phénomènes para normaux

Après que Juan Diego eut montré l’endroit où la dame du ciel voulait que son église soit construite, il demanda la permission de prendre congé. Il voulait rentrer chez lui pour voir son oncle Juan Bernardino qui était gravement malade quand il l’avait quitté pour aller à Tlatilolco, appeler un prêtre afin d’entendre sa confession et lui donner l’absolution. La Dame du ciel lui avait dit que son oncle était guéri. Mais ils ne le laissèrent pas partir seul et l’accompagnèrent jusqu’à chez lui. Comme ils arrivèrent, ils virent que son oncle était heureux et en bonne santé.

Il était très stupéfait de voir son neveu ainsi accompagné et honoré, et demandait la raison d’un tel honneur. Son neveu répondit que lorsqu’il partit chercher le prêtre pour entendre sa confession et lui donner l’absolution, la Dame du ciel lui apparut à Tepeyac lui disant de ne pas être triste, que son oncle allait bien, ce qui l’a consolé. Elle l’a envoyé à Mexico voir l’évêque afin que ce dernier lui construise une maison à Tepeyac. L’oncle témoigna de ce que c’était vrai qu’à cette occasion il fut guéri et qu’il l’avait vue de la même manière que son neveu, apprenant d’elle qu’elle l’avait envoyé à Mexico pour voir l’évêque. La Dame lui dit aussi que, lorsqu’il irait voir l’évêque, il devrait lui révéler ce qu’il avait vu et lui expliquer de quelle façon elle l’avait guéri miraculeusement et elle voulait être appelée « La toujours vierge Sainte Marie de Guadalupe »et que son image bénie soit aussi ainsi connue.

Juan Bernardino fut conduit en la présence de l’évêque afin qu’il l’en informe et lui donne un témoignage.  Son neveu et lui furent les invités de l’évêque chez lui jusqu’à ce que l’église consacrée à la Reine de Tepeyac soit construite là où Juan Diego l’avait vue. L’évêque transféra l’image sacrée de la belle dame du ciel de sa chapelle privée à l’église principale afin que tout le peuple puisse voir l’image bénie et l’admire. La cité tout entière était sous le coup d’une grande émotion. Tous vinrent la voir, admirer l’image pieuse et prier. Ils s’émerveillèrent de son apparition dans ce divin miracle car aucune personne humaine de ce monde n’avait peint cette image précieuse. 

Eléments conformes aux autres apparitions 

  • La demande de construction d’une église
  • Marie s’adresse à un « petit », un indien très pauvre et très religieux. 
  • Les évènements miraculeux : l’impression des fleurs sur le Tilma de Juan Diego et sa non altération à l’usure du temps ; 
  • Les fleurs qui s’épanouissent en décembre. 
  • La guérison de l’oncle. 
  • La Vierge apparaît sur une colline. 
  • Ses vêtements brillent comme le soleil. 

Eléments spécifiques

Marie laisse une trace ineffaçable de son passage : son image imprimée sur le maillot de corps de Diego ; événement rare dans les apparitions. Les seules autres traces persistantes connues sont la présence d’une source dont on ne sait si elle a été seulement « découverte » par la voyante ou due à l’intervention de la Vierge.  

V – Reconnaissance et sanctuaires

Reconnaissance

Les plus importants documents approuvés par l’Église Catholique lors du procès en canonisation de Juan Diego sont : le Nican mopohua, le récit des apparitions écrit en náhuatl, la langue parlée par les indiens de la vallée de l’Anahuac (Mexico) écrit vers 1545-1548 par Antonio Valeriano (en). Élève brillant du Collège de Santa Cruz de Tlatelolco, où il apprit l’espagnol et le latin, il fut nommé professeur à 21 ans, puis vice-recteur du collège et informateur de l’historien Fray Bernardino de Sahagún. Son texte fut publié pour la première fois en 1649.

Une des copies originales de l’époque de ce très précieux document se trouve à la Bibliothèque Publique de New York, et a fait l’objet d’une multitude d’études par un grand nombre d’historiens. Ce sont aussi les témoignages recueillis lors des informations juridiques de 1666 (en).Le livre-dossier (El encuentro de la Virgen de Guadalupe y Juan Diego) dont les auteurs, Fidel González Fernández, Eduardo Chávez Sánchez et José Luis Guerrero Rosado, postulateurs pour la cause de Juan Diego, nous présentent les événements vécus par le Mexique au XVI e siècle, est le fruit des années de longues recherches dans le but de démontrer historiquement la vérité sur la vie de Juan Diego,.

Le Pape Jean-Paul II déclare Juan Diego bienheureux le 9 avril 1990 et le canonise le 31 juillet 2002 à l’occasion de son voyage au Mexique, malgré la réticence d’une partie du clergé mexicain (notamment de l’évêque Guillermo Schulenburg (en) de la basilique Notre-Dame-de-Guadalupe de Mexico) qui considère que l’existence historique du nouveau saint est infondée. Le secrétaire de la conférence des évêques mexicains déclara même alors : « Juan Diego Cuauhtlatoatzin a-t-il existé ou pas? A-t-il fait des miracles? L’important, c’est que notre peuple mexicain croit en la vierge de Guadalupe. C’est peut-être cela le plus grand des miracles ! »

Juan Diego devient ainsi le premier saint amérindien de l’Église catholique, fêté le 12 décembre, et cette canonisation augmente la popularité de la Vierge de Guadalupe dont l’image est omniprésente dans les foyers, les taxis, commerces et lieux publics du Mexique. Le maire de la municipalité indienne de Tatahuicapan, peu favorable à la démarche religieuse, a senti le besoin de préciser : « la canonisation de JDC n’a rien à voir avec la reconnaissance de nos droits et de notre culture. Pour le gouvernement, ce n’est que de la publicité. »

Eléments de controverse

L’historicité de Juan Diego soulève un débat historiographique car aucune mention historique concernant ce personnage ne remonte avant 1648 (date à laquelle le prêtre Miguel Sánchez écrit dans son ouvrage théologique « Imagen de la Virgen María » quelques phrases sur la vie de Juan Diego dans un ermitage, depuis ses apparitions jusqu’à sa mort et les documents sont le plus souvent de seconde main. De nombreux historiens restent sceptiques quant à l’existence de Juan Diego. 

Le sanctuaire 

Chaque année, une foule, estimée à dix millions de personnes, la visite faisant de l’église de la Cité de Mexico, le sanctuaire catholique le plus populaire dans le monde après le Vatican. Sa Sainteté le Pape Jean Paul II visita par deux fois le sanctuaire, se prosterna devant l’image, implora son assistance maternelle et l’invoqua comme la Mère des Amériques. Tout récit sur les apparitions de Notre Dame de Guadalupe est inspiré du Nican Mopohua, ou Huei Tlamahuitzoltica, écrit en Hahuatl, la langue Aztèque, par l’écrivain Indien Antonio Valeriano autour de la moitié du XVIe siècle.  Une église (Notre-Dame de Guadalupe) est édifiée, et cette vision mystique de Juan Diego favorise le mouvement de conversions religieuses au catholicisme, encouragé par les missionnaires espagnols.

Nouvelle cathédrale Notre Dame de Guadalupe à Mexico
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La basilique Notre-Dame-de-Guadalupe est une basilique catholique consacrée à la Vierge de Guadalupe, située sur la colline de Tepeyac, dans la delegación Gustavo A. Madero de Mexico.15 à 20 millions de pèlerins se rendent tous les ans à la Basilique Notre-Dame de Guadalupe de Mexico (dont près de la moitié les jours précédant le 12 décembre, fête de la Vierge de Guadalupe), ce qui en fait le monument catholique le plus visité avec la cathédrale Notre-Dame de Paris et après la cité du Vatican. Elle expose la tunique de Juan Diego Cuauhtlatoatzin où s’est imprimée l’image de la Vierge Marie, à la suite de son apparition à ce berger.

L’intérieur de la basilique Notre dame de Guadalupe
Par Joaquín Martínez Rosado — Travail personnel, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=6941622